Monde de couleurs et d'images, monde sans cesse le même mais toujours recommencé et que je vous convie à parcourir en ma compagnie avec le vent pour compagnon à nos semelles
23.11.06
Les travaux
Evidemment ça été du sport pour s’intégrer dans la circulation sur le périphérique mais il a fini par mettre le cap au sud.
Quelle circulation et comme dab, avec son immatriculation provinciale, ces cons de Parisiens ont voulu lui prouver qu’ils sont des champions en matière de conduite automobile. Capables d’utiliser un accélérateur et de dépasser tout ce qui les entourent en prenant le maximum de risques. Mais bon, ils sont comme ça, autant ne pas faire attention
-Tu veux dépasser ? Eh, bien vas-y mon brave! Je ne suis pas vraiment à une place près.
A cette époque de l’année, la nuit tombe vite, il fait déjà moins clair, il va falloir qu’il fasse gaffe, la dernière fois qu’il a pris la route, il a bien failli prendre la mauvaise direction et il été obligé de se rabattre sur la droite au tout dernier moment pour reprendre la bonne direction au grand dam d’un « confrère » autoroutier qui a aussitôt manifesté sa mauvaise humeur par un coup de klaxon courroucé.
Bon, on y est ! Porte d’Italie et les virages à venir pour quitter le périph’. Comment a-t-on pu laisser se construire de pareilles horreurs, tout est gris, sale, fait d’un béton vieilli avant l’âge et dangereux en plus avec ces courbes prononcées où il faut se battre pour garder une trajectoire correcte.
5 heures de route au bas mot. Il fera une halte pour un complément de plein avec un café noir en prime. Il lui téléphonera juste pour le plaisir sans cesse renouvelé d’écouter sa voix et ils se raconteront deux ou trois bêtises. Elle lui dira bien sûr de faire attention et ça le fera rire et une fois encore, elle fera l’inventaire des choses qu’il est censé lui ramener de Paris et tant pis pour les objets qu’il aura pu oublier. De toutes les façons, pas question de faire demi-tour. Ils échangeront un baiser au travers du combiné et probablement elle ira vérifier que le plat qu’elle lui a préparé mitonne comme il convient.
Il pleut, plus exactement il pleuviote et il est obligé d’actionner ses essuie-glaces, de les arrêter, de les remettre en route quand le caoutchouc commence à racler le pare-brise avec un bruit désagréable et ça le fait ronchonner. Il aime bien lorsque il est sur l’autoroute après avoir ajusté le régulateur de vitesse n’avoir rien d’autre à faire qu’à surveiller le ruban macadamisé qui se déroule sous ses yeux
Ah ! Bien sûr, il fallait s’y attendre, des travaux !!! Il ne manquait plus que ça. Tomber la vitesse, première chose à faire. Voilà quelque temps, un automobiliste, en excés de vitesse, à percuté des pompiers présents sur les lieux de travaux en cours et le corps de l’un d’eux, catapulté dans le fleuve proche n’a jamais été retrouvé semble t-il.
Des balises oranges et blanches et des trucs qui flashent et s’illuminent à son passage et un bref instant il se demande s’il déclanche un mécanisme quelconque au fur et à mesure de son avance ou si tous ces dispositifs lumineux clignotent et palpitent en permanence.
Depuis combien de kilomètres roule t-il maintenant à vitesse réduite ? Sans être un obsédé de la moyenne, il lui faudra quand même plus de temps que prévu pour atteindre son but
Evidemment, pas de trace de travailleurs, pas de traces de travaux non plus d’ailleurs. A croire qu’ils le font exprès pour les garder, les automobilistes, plus longtemps sur l’emprise de leur empire de macadam.
Il aurait du s’arrêter à la station qu’il a vue avant d’aborder cette portion en travaux, sa vessie commence à se rappeler à son bon souvenir et il va lui falloir prendre une décision
Depuis quelque temps déjà, il n’a pas aperçu d’autres feux de véhicules, ni devant lui, ni derrière lui mais ce fait ne l’inquiète pas outre mesure. Après tout, on n’est vraiment pas en pleine saison touristique et à cette heure tardive, rien que de très naturel que d’être seul pendant quelque temps sur cette portion de route
Il a quitté la zone de travaux, il ne s’en est pas aperçu immédiatement d’ailleurs, c’est après un moment qu’il s’est dit qu’il allait pouvoir reprendre une allure normale.
Sur sa droite, il aperçoit l’amorce d’une voie qui s’enfonce entre deux rangées de buissons, un parking mal signalé pense t-il et il se dit qu’il va s’arrêter juste un instant pour satisfaire son besoin naturel.
Il s’engage sur le chemin qui s’offre à lui et arrête le véhicule. Avant de descendre, plus par réflexe qu’autre chose, il coupe le contact. Après être sorti du véhicule, machinalement, il s’étire et redresse ses reins douloureux puis il fait un pas en avant…
Pendant une fraction de seconde, seul un bruit de branches cassées se fait entendre dans le silence absolu qui règne ici puis c’est, soudain, un long hurlement, un cri qui rebondit sur des murs ou des parois, un cri qui brusquement s’éteint rendant le silence de la campagne environnante encore plus épais et prégnant.
Deux ou trois oiseaux dérangés dans l’arbuste qu’ils s’étaient choisi se sont aussitôt envolés mais sont revenus bientôt rassurés par le calme revenu…
Le jour a fini par poindre, un petit jour poisseux et collant suintant d’humidité surie. Les amateurs de logiciel de modification d’image comprendront sans nul doute ce que je veux évoquer. Cela a commencé par l’arrière de la voiture, peu à peu, sa silhouette, lentement, précisément, inexorablement, abandonne ses formes au profit des couleurs et du fouillis des branchages environnants. ..
On peut estimer qu’au moment où le clair-obscur cédera enfin la place au jour à venir, quand péniblement et comme à regret les derniers lambeaux des brumes s’évanouiront pour redonner sa réalité banale à ce coin désolé de campagne isolée, tout sera redevenu comme avant, comme si rien n’était venu s’arrêter en ces lieux, la nature aura repris ses formes et quelques oiseaux pourront, tristement, à l’abri de quelques feuilles, s’interpeller et se répondre par de timides trilles, des chants mélancoliques et beaux où se mêlera l’écho d’un autre cri qui n’en finit pas de s’évanouir, s’évanouir, s’évanouir ….
Claude
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Ombres légères
J'ai récemment évoqué ici deux silhouettes féminines qui ont, plus ou moins brièvement, croisé ma vie à divers ...
-
'Una mancha de color', une touche de couleur en espagnol. Ce n'est pas que je sois hispanophone, pas le moins du m...
-
LE MARCHE D'ALIGRE J’aime le marché d’Aligre, c’est à Paris, dans un recoin du XIIème entre Bastille et gare de Lyon. Bon, je ne...
2 commentaires:
Il a disparu ? avalé par la nature ?
C'est la terre qui baille
et ouvre une faille
pour ensevelir
en ses profondeurs
le promeneur imprudent
et qui s'empresse
de dissimuler ses forfaits ;-))
Enregistrer un commentaire