30.7.06

Les voyages immobiles (8)




D’OCRE, DE MARRON ET DE BLEU

D’ocre, de bleu et de marron sur fond d’azur infini
Le ciel profond d’une porte marocaine ouverte vers les grands espaces du sud et ses immensités monocolores que l’ocre des murs nous rappelle ici
Retrouver l’allégresse des départs, le chèche rabattu sur les yeux et les joues brûlées par une gifle du sable
Calculer ses pas et suivre la marche des étoiles et donner rendez vous au renard des sables et chercher dans la dune qui s’étend et s’élève la trace légère des pas d’un enfant qui fut un petit prince, suivre la trace de son renard du désert et cueillir la rose de pierre qui fleurit sur des chemins sans nom
Et s’en retourner à ses voyages immobiles avec dans les oreilles le chant du sable qui chante et la symphonie d’un monde qui monte à l’assaut de souvenirs bien mal enfouis au creux d’une mémoire qui déroule ses rêves flamboyants à l’abri derrière des paupières closes

Claude

28.7.06

Les voyages immobiles (7)



LES SAISONS

Eté indien, une belle photo où l’été jette ses derniers feux avant le grand sommeil de l’hiver. J’ai toujours aimé cette luxuriance de couleurs où l’œil ne sait plus où donner de la tête si j’ose dire.
La nature s’amuse à se faire belle avant l’inévitable triomphe des gris et des noirs et je me souviens de mes rentrées scolaires d’antan. Pas d’érables comme ici bien sûr mais les marronniers faisaient bien l’affaire avec leurs couleurs tirant vers le jaune avec des traces de rouille
Déjà dans mon jardin, les bouleaux ont commencé à perdre leurs feuilles. Bientôt nous regarderons en direction du couchant les nuages s’amonceler en prélude aux tempêtes d’équinoxe et nous essayerons de capter la rumeur lointaine de la mer, un temps de l’année succédera à l’autre et j’aurai comme toujours l’envie que tu me rassures et que ton souffle dans mon cou porte le souvenir des douces brises de l’été et comme toujours j’aurai envie de l’empreinte de ta main légère sur le haut de mon bras en marque de possession acceptée et comme toujours j’aurai envie de l’écho de ton rire pour faire fuir les ombres de la nuit pour que continuent nos jours à l’orée de la saison nouvelle

Claude

27.7.06

Les voyages immobiles (6)




SANTORIN


Santorin, les Cyclades, vous connaissez ? C’est au sud de la Grèce. On y va en bateau. Normal pour des îles non ?
Bon, Santorin, un volcan qui a explosé voilà 3 ou 4000 ans. On pense que Platon s’est servi de cet épisode qui a en plus engendré un meurtrier tsunami pour fonder le mythe de l’Atlantide
Vous avez vu la photo, un oeil ouvert sur la mer, du bleu et de blanc Un paysage bien joli et bien kitch.
J’y suis allé avec elle, elle portait souvent une robe bleue d’ailleurs et ça aussi c’était bien joli, ses cheveux blonds sur des jambes bronzées et un sourire qui embellissait mes jours.
On descendait la falaise jusqu’au petit port qui se trouvait plus bas. 13 putains de virages, 13 à l’aller, 13 au retour. Aujourd’hui, je pourrais faire la descente et faudrait que ma dulcinée me prenne dans ses bras pour la remontée pour me ramener à l’hôtel
On buvait de l’ouzo à tous les repas, il m’est même arrivé de tenter l’expérience au petit déjeuner, j’ai vite arrêté.
On buvait aussi de ce blanc qui tire parfois sur le rosé et dont j’ai oublié le nom avec un goût de sève de pin. Et on se goinfrait de mézévés et de brochettes.
Tôt le matin, on regardait la légère brume jetée sur la mer comme une diaphane écharpe et on guettait, silencieux, les aller et retour des bateaux partis en pêche
Et on s’engueulait pour savoir qui aurait raison pour la suite du jour, farniente sur une plage bordée de sable noir nostalgique ou promenade pour découvrir l’intérieur des terres
On faisait souvent l’amour aussi et je croyais ne jamais pouvoir me rassasier de ce corps bruni par le soleil avec des seins lourds et des fesses musclées
Tout ça est bel et bien mort. Je n’ai pas la moindre idée de ce qu’elle est devenue. Pour tout dire, je m’en fous complètement comme je me fous des décors kitch, plein de bleu et de blanc
Tous ces souvenirs me donnent la nausée, ces bribes du temps passés qui entravent ma marche comme le fait à un bateau l’ancre de miséricorde, les souvenirs aujourd’hui m’emmerdent comme les rêves qui vont avec.
Pour être franc, la vie réelle m’emmerde encore plus et j’en ai marre de traîner après moi ces fantômes d’un lointain passé alors que je m’abîme dans l’écoute du Requiem de Verdi et ses majestueuses mesures où plane, impavide et patient, l’ange noir de la mort

Claude

25.7.06

Les voyages immobiles (5)




ESCALADE

La verticalité des mondes minéraux m’oppresse, je sens en moi le silence et le poids des pierres. Il m’arrive d’être parfois sujet au vertige et ceci explique peut être cela.
Je reste interdit et admiratif devant ceux ou celles qui se lancent à l’assaut d’une paroi verticale, progressant collés à la parois, en recherche de prises et appuis, s’élevant à la force des bras, lentement vers le sommet salvateur. Et parfois, c’est la chute brutale, le plongeon sur fond d’azur.
Ont-ils le temps de revivre toute leur vie comme on le prétend dans ces quelques secondes au mieux que leur accorde le fil interrompu ou alors ont-ils déjà coupé le contact en vue du choc qui mettra fin à leur vie
Des conquérants de l’inutile les a-t-on appelés. Mais ne sommes nous pas tous de ces conquérants de l’inutile qui tournent et virevoltent à la poursuite chacun de sa chimère
Ce rêve (quand j’arrive à m’endormir) revient souvent et je me réveille, le cœur au bord des lèvres, une descente vertigineuse filant le long de parois à peine suggérées, des parois lisses sans possibilité de prise avec chaque cellule de mon corps en l’attente de l’atterrissage brutal . Un cauchemar à l’état brut avec le vide et le néant pour décors
Je me souviens de ce type que j’ai du aller rechercher au dessus de moi alors que pétrifié par la peur, il se tenait collé au rocher, incapable de faire le moindre mouvement. J’ai du le convaincre de placer ses pieds, l’un après l’autre, sur des aspérités de la roche. Il a fini par reprendre confiance et à suivre mes instructions. Curieusement, je n’ai ressenti aucun vertige, trop occupé par ma tâche. En arrivant sur la plate forme en contrebas et en sécurité, il s’est assis et a pleuré. Nous n’avons jamais reparlé ensemble de ce «sauvetage»

Ce n’est certainement pas ce minuscule souvenir qui alimente mes persistantes insomnies, seulement le sommeil à trouver m’est aussi difficile qu’une paroi à gravir et je poursuis mes voyages immobiles en conquérant de l’inutile comme celui qui escaladait les montagnes simplement parce qu’elles étaient là, je vis quant à moi simplement parce que je suis là

Claude


24.7.06

Les voyages immobiles (4)



MANHATTAN


Les filins qui soutiennent le pont sont comme les cordes d’une guitare et peut être qu’un musicien vient parfois s’entraîner sur cet immense instrument.
Nous avions loué une chambre dans le Bronx, un petit hôtel pas très confortable. En bas, il y avait une pizzeria et j’étais devenu copain avec le propriétaire, il était fasciné par l’Europe et souvent il me disait qu’il voudrait quitter ce quartier de merde et revenir au pays de ses ancêtres. Je l’écoutais d’une oreille distraite en mâchonnant l’une de ses pizzas caoutchouteuse qui avaient un goût de rien.
Il m’arrivait de la voir arriver et monter la rue en repoussant souvent les cheveux qui tombaient devant les yeux. On décidait parfois d’aller dans l’un des rares bars à vin de Greenwich village et on ramenait une bouteille dans un grand sac de papier. On buvait le vin dans nos verres à dentifrice et on allait directement au lit.
On faisait l’amour et on oubliait pour un moment l’énorme rumeur de la ville qui rentrait à flots par la fenêtre ouverte
Tu es partie sans prévenir avec un guitariste qui exerçait sa coupable industrie dans quelques bars de Manhattan
J’ai pris la guitare en sainte horreur et quand je vois un pont avec des putains de filins disposées comme les cordes à partir de la table d’harmonie de l’instrument, j’ai envie d’en couper une ou deux et que je voie tout ce bordel se précipiter dans les eaux boueuses du fleuve

Claude

22.7.06

Les voyages immobiles (3)


TARA


"Le temple funéraire d’Aménophis III à Thèbes est gardé par deux statues colossales représentant le pharaon assis. Endommagées par un tremblement de terre en 27 av-JC, elles se rendirent célèbres par un phénomène étrange: Tous les matins, un des colosses chantait! L’historien voyageur Strabon, qui assista au phénomène, fut sceptique et cru à une machination pour épater les touristes. Ce chant matinal perdura toutefois tous les matins jusqu’à la restauration de la statue au IIIe siècle sous ordre de Septime Sévère. Le phénomène était sans doute du à une réaction de la pierre à la condensation de l’eau de la rosée matinale."

(Ceci se passe à Thèbes et non à Abou Simbel me direz vous mais qui sait si les statues chantantes ne furent pas aussi à l’œuvre dans ces lieux où, muets maintenant, elles nous jaugent de leurs regards impénétrables)


L’Egypte, c’est fascinant n’est-ce pas? Incroyable civilisation en effet qui s’allonge sur plusieurs millénaires et qui apparaît vêtue de pied en cap si j’ose dire, avec son langage, son écritures, les hiéroglyphes, sans que l’on sache exactement d’où lui vient cet héritage et comment il lui a été transmis.
Civilisation dont on ne comprend pas toujours forcément les motivations et en particulier cet irrépressible fascination de la mort et des voyages dans l’au-delà traduite dans ces monuments qui défient les millénaires et dont il n’est pas du tout certain qu’ils ne soient que des tombeaux ou des chambres funéraires et dans la construction desquels un message secret attend peut être encore son découvreur.
Civilisation enfin qui étend peut être encore aujourd’hui son emprise sur nous même sans que nous en soyons bien conscients…





Ils ont débarqué à Abou Simbel après un long vol à partir du Caire. 40° de température au bas mot mais des degrés supportables en raison de l’absence quasi-totale d’humidité.
Impressionnants ces colosses et ces temples que l’ONU a démontés pièce par pièce pour les remonter plus haut sur une butte artificielle afin de les préserver de la montée des eaux du lac Nasser. Mais les visages ont conservé leur énigmatique sérénité avec aux lèvres leurs mystérieux demi-sourires et on essaie toujours d’imaginer l’époque de leur construction dans ce désert au milieu de nulle part et à mille lieues de toute présence humaine placés là pour un dialogue éternel entre l’immensité sableuse du désert omniprésent et les flots impassibles du grand fleuve venant baigner les pieds de ces dieux des temps anciens…

Tara, elle s’appelle Tara, elle aura 16 ans au moment de l’année où les rayons du soleil commencent le matin leur lente ascension vers la poitrine de notre maître et roi sculpté dans la pierre rouge de la falaise.
Elle est venue avec son père d’au-delà les monts de la lune, plus loin encore que les terres où régnèrent en leurs temps les pharaons noirs vers ces endroits où me dit elle le grand fleuve n’est qu’un ruisselet, qu’un enfant de fleuve
Elle s’appelle Tara et je suis Ischter, fils de scribe de haute lignée et nous nous marierons quand se lèveront les semailles dans les champs fertilisés par la boue nourricière des eaux bienveillantes du grand fleuve
Elle a la peau douce comme lait d’amande et ses yeux noirs s’étirent vers ses tempes, des yeux qu’elle souligne d’un trait noir étendu avec une fine brosse faites de poils d’une gazelle du désert.
Son père est un artiste de la pierre et c’est lui qui a donné les instructions pour que s’élèvent au dessus de la poussière et du sable du désert les traits de notre roi et des dieux qui le protégent
Tara m’a entraîné ce matin là en me prenant la main vers cette statue du dieu qu’il est interdit d’approcher de trop près mais elle a décidé de braver l’interdit et nous descendons vers la base de la falaise vers cet endroit précis, cet endroit où on entend le dieu parler
Elle a levé les yeux vers moi et elle mis un doigt devant sa bouche pour m’imposer le silence et ne pas réveiller un prêtre ou un garde tous endormis en ces instants bénis du matin avant que l’infernale chaleur ne reprenne bientôt ses droits
Et nous sommes arrivés au pied du colosse et elle m’a regardé avec amour et confiance avant que de se pencher vers une petite anfractuosité du rocher. Je l’ai vue se pencher sa mince tunique de lin flottant doucement autour de son corps dans le vent léger du petit matin.





Quand elle s’est retournée vers moi, je n’ai pas reconnu son regard, ses yeux noirs étaient devenus immenses et ils me fixaient plein d’épouvante et d’effroi. Un court instant, j’ai pensé qu’elle avait aperçu une vipère des sables glissant tout près sur le sable mais c’est bien moi qu’elle fixait ainsi.
J’ai voulu faire un pas en avant et j’ai ouvert la bouche pour dire un mot. Mais en levant les mains d’un geste impérieux, elle m’a fait signe de m’arrêter et c’est alors que, sortant de ses lèvres, j’ai entendu ces paroles extraordinaires:

-Va t’en, tu en fait partie, tu es un homme de ces temps à venir, tu es de ceux qui vont détruire ce que nous avons fait, nos dieux, nos temples, tu es de ces barbares et je te hais !

Sa voix était montée dans les tons hystériques et ses yeux s’étaient remplis de larmes.
Soudain, faisant demi-tour, elle commença à courir en direction de la falaise qu’elle entreprit d’escalader
Le bruit avait réveillé des gardes qui se mirent à courir en ma direction me faisant perdre du temps pour me mettre à sa poursuite. C’est donc avec retard que je commençais, abasourdi par la tournure des événements, à gravir la pente qui commençait abruptement de chaque côté où s'élevaient les majesteuses statues
Elle avait le pied sûr et montait avec rapidité en s’accrochant à la moindre pierre ou en s’aidant de la moindre anfractuosité dans le rocher, parfois quelques chutes de pierrailles soulignait son avance au dessus de moi
Luttant contre l’essoufflement, je lançais son nom de temps à autre
-Tara, que se passe t-il, Tara, attends moi, Tara, je t’aime, attends !!!
Mais aucune réponse ne me parvint, il me sembla percevoir quelques paroles, comme une supplication, comme une antienne, comme la prière que l’on adresse aux dieux quand s’en revient le soleil de son habituel voyage nocturne mais soudain c’est un grand hurlement que j’ai perçus, un cri inhumain accompagnant une tunique de lin blanc que je vis passer, flottant autour d’un corps gracile, en un éclair devant moi
Elle s’est écrasée plus de 10 mètres plus bas et quand je suis arrivé à elle, fendant le petit groupe de jeunes prêtres et de soldats, du sang s’étendait en large tache sur sa tunique blanche, ses traits étaient paisibles et elle avait cessé de vivre…

Le groupe de quelques touristes occidentaux s’est dirigé vers les temples. Ils portent des casquettes bigarrées et des shorts qui leur battent les genoux. Sur conseil de leur guide, ils sont munis de bouteilles d’eau et ils s’arrêtent de temps à autres pour humidifier une gorge qui devient râpeuse et rêche sous l'effet de la montée des températures.
Il a mal dormi la nuit dernière et a pesté une fois encore contre la clim’ qu’il a trouvé bruyante et réglée trop bas. Ils se sont réveillés très tôt avant de commencer la visite. Derrière eux s’étend le lac Nasser et on ne peut distinguer la rive opposée déjà perdue dans les premières brumes de chaleur
L’un des touristes, un homme d’âge mûr, s’est inquiété de savoir s’il pourrait avoir du vin au repas du midi car ça commençait à lui manquer, sa femme, une blonde à la poitrine imposante, a commencé à parler de leur amis qui leur ont présenté l’hiver dernier toutes les photos prises durant leur visite aux temples et ils ont bien l’intention de leur rendre la pareille avec les mêmes photos d’ailleurs. Une petite jeune femme brune a continué à s’enfoncer dans le même mine maussade qu’elle arbore depuis leur départ de France

Il a grommelé quelque chose et sa compagne s’est rapprochée de lui
-Que dis tu? Ca ne va pas?
-C’est mon rêve de la nuit dernière, un drôle de rêve où je suis Egyptien des anciennes époques et où je m’appelle Ischter et qui se termine mal avec un cri monstrueux et qui n’en finit pas
-Bon, ce n’est qu’un cauchemar, probablement le bruit de la clim’ que ton cerveau a interprété à sa façon. Allez prépare toi au spectacle, tout va aller mieux, tu vas voir !

Il a hoché la tête en lui retournant son sourire, Mais en lui, le malaise a persisté, une boule au niveau de l’estomac qui grandit au fur et à mesure de leur approche au temple
Ils sont maintenant devant les 4 colosses qui montent la garde devant la porte du temple. Leur jeune guide continue ses explications mais ses mots ne sont pour lui qu’un lointain bourdonnement et son malaise s’est amplifié.
Soudain, profitant de l’entrée du groupe à l’intérieur du temple, il a faussé compagnie à son amie en rebroussant chemin en direction du colosse assis à gauche et là tout en bas, proche du pied du dieu il a foncé droit vers une anfractuosité du socle et sans hésiter il a collé son oreille contre la pierre de granit rouge.
Pendant ce temps, dans le temple, les touristes ne se sont pas lassés d'écarquiller les yeux pour distinguer les divinités et les inscriptions alignées le long des murs en écoutant d’une oreille plus ou moins distraite les explications de leur guide.
Soudain, la jeune femme s’apercevant de l’absence de son compagnon a fait demi-tour en glissant à sa voisine:
-Je reviens
Quand elle a surgi sur l’esplanade, celle-ci lui est apparue déserte sous l'implacable soleil et c’est en clignant des yeux qu’elle a du balayer le paysage à la recherche de son ami
C’est un mouvement soudain qui l’a amenée à regarder vers le haut et soudain elle l'a vu, accroché à la paroi, progressant vers le haut et pendant une fraction de seconde elle est restée interdite puis la parole lui est revenue:

-Mais tu es fou, qu’est ce qui te prend, descends immédiatement, tu vas te casser le cou, descends, je te dis!

Il s’est arrêté un instant pour la regarder, accroché à mi-pente:

-Elle avait raison, Tara avait raison comme dans mon rêve et elle hurle et elle pleure encore dans la roche depuis tout ce temps.

-Mais de quoi parles tu ? Au nom du ciel, redescends! Qui est cette Tara?
-Nous sommes coupables, nous sommes des barbares elle le savait, elle me l'avait dit et nous ne savons que détruire et couper ces liens qui auraient du nous relier encore aujourd'hui à ceux là qui nous ont précédé jusqu'à ces dieux qu'on ne connaît plus.
-Descends, je te dis, ça devient n’importe quoi !

Elle avait maintenant des sanglots dans la voix et, attirés par le bruit, le guide et son petit groupe étaient sortis du temple pour se rapprocher de l’endroit où elle se tenait.
Pendant ce temps, il avait continué son ascension sans plus se retourner et tout le monde avait les yeux fixés sur sa marche en avant

Arrivé au niveau de la tête du souverain, le colosse de droite, il se retourna, jeta un regard vers les eaux perfides du lac Nasser et lentement il bascula vers l’avant. La petite foule cria de stupéfaction puis d’horreur et le corps s’écrasa quelques 10 mètres en contrebas.

En courant sa compagne se précipita vers le point d’impact, du sang s’étendait en large tache sur la chemise blanche de son compagnon, ses traits étaient paisibles et il avait cessé de vivre…



« Le grandiose éperon rocheux, point de repère pour la navigation, dominait une vaste courbe du Nil, relate l'égyptologue Christian Jacq dans Le Temple des millions d'années. Sur les rochers, des inscriptions hiéroglyphiques rappelaient que l'endroit était placé sous la protection de la déesse Hathor, souveraine des étoiles et des navigateurs qui faisaient volontiers halte en ce lieu. À lui, Ramsès, de faire d'Abou Simbel une merveille qui défierait le temps et scellerait la paix entre l'Égypte et la Nubie. Ici serait construit le sanctuaire magique de la province ; il rassemblerait les énergies divines et diffuserait un faisceau de protection si intense que le fracas des armes disparaîtrait. »

Le pacte des temps passés entre les dieux et les hommes a été rompu, le lac Nasser a englouti les endroits choisis de toute éternité pour être la demeure des dieux sur cette terre, toute l’économie humaine et géographique a été modifiée jusqu’au delta, jusqu’à la lointaine Méditerranée et nul n’oserait penser au véritable cataclysme que serait pour toute la vallée du Nil l’effondrement du barrage pour cause naturelle,suite à un attentat ou alors du fait de la colère des dieux…

Claude

20.7.06

Les voyages immobiles (2)





LES NEIGES DU KILIMANDJARO

Une nouvelle d’Hemingway commence comme ça : «On a trouvé la carcasse congelée d’un léopard à plus de 6000 mètres d’altitude, on a jamais ce que la bête venait faire à une pareille altitude»
C’est par ces mots que débute «Les neiges du Kilimandjaro», une mince nouvelle sur un écrivain qui a perdu le don d’écrire et qui meurt de gangrène sur fond de la plus haute montagne d’Afrique dans les cris et l’indifférence des animaux, les querelles qu’il entretient avec sa femme et le souvenir d’un ancien amour engloutit dans la guerre d’Espagne.
Sur le point de mourir, il aperçoit ce magnifique sommet empanaché de neiges éternelles et peut être comprend t’il alors enfin la signification de la présence de cette carcasse de léopard mort en cet endroit...

Je t’ai embrassée juste à côté du stand d’un bouquiniste avec Notre Dame juste derrière nous. Comme dans le film. J’avais choisi ce lieu pour être à l’endroit parisien exact, dans un de ces flashbacks dont le film est truffé, où Gregory Peck prend dans ses bras Ava Gardner, la femme qu’il va perdre et qu’il ne pourra jamais oublier.

Je ne t’ai rien dit, bien sûr. Je crois n’avoir jamais été aussi heureux de ma vie que ce soir là alors que les rayons du soleil déclinant venait lécher les façades de l’hôtel Dieu. Je n’ai jamais été aussi heureux que ce soir là avec ce cœur que je sentais battre contre ma propre poitrine, jamais aussi heureux avec la douleur du déchirement que je savais inévitable de ton prochain départ

Ce mot de Kilimandjaro est resté en moi comme un talisman et ses sonorités ont toujours été comme une douce musique entre le vert des arbres de la savane et le rouge ocre des pistes. Je n'ai jamais vu cette montagne sauf au cinéma, l'Afrique que je connais est celle de Dakar avec ses longues houles atlantiques ou le sable jaune où s'enlise Niamey sous les assauts des dunes sahariennes

Bien des années ont passé depuis et peut être, si tu es encore de monde, t’en souviens tu comme moi de cette fin de jour, dans la rumeur sourde de la ville livrée à mille occupations

Je peux te le dire ce soir, je ne sais toujours pas, moi non plus, ce qu’est allé faire le léopard pour mourir à cette altitude. J’ai lu récemment qu’avec le réchauffement de la planète, le Kilimandjaro devrait bientôt perdre sa couronne de neiges que l’on pensait éternelles.
Et alors, la carcasse décongelée du léopard devrait pourrir pour enfin disparaître définitivement et alors plus personne ne cherchera plus à savoir pourquoi il est allé mourir si haut dans la montagne.
Et il m’appartiendra alors de gravir un autre Kilimandjaro, très haut, là-bas jusqu'à sa blanche couche neigeuse pour m'y étendre et y fermer les yeux en souvenir de toi.

Claude

Les voyages immobiles (1)





EMBARQUEMENT POUR...

J’aime cette image en camaïeu de bleus. Un ponton qui entre dans la mer comme une étrave, une invite au voyage entre l’horizontalité de la mer et la verticalité du ciel.
J’aurais aimé me rendre avec toi tout au bout de cette invite au voyage et que nous trempions nos pieds dans la tiédeur océane en regardant les nuages s’épuiser dans leurs luttes vaines contre les alizés
Et j’aurais pris ton épaule pour que ta tête vienne se nicher au creux de la mienne alors j’aurais senti dans tes cheveux les mille odeurs des épices de l’archipel mélangés à l’âcreté du sel marin
Et nous aurions ri à l’arrivée impromptue d’un poison du récif en tournée de surveillance qui, juste pour la beauté du geste, nous aurait fait l’aumône d’un reflet multicolore sur ces écailles multiples
Et nous aurions rêveusement laissé les heures défiler et regardé dans sa course folle le soleil décrire son ellipse habituelle à cheval entre eau et horizon
Et nous aurions été au point zéro des origines, abscisses et ordonnées d’un système entre temps et ciel où nous en aurions été le commencement et la fin
Nous aurions été de ces voyageurs immobiles cinglant vers des îles insoupçonnées ou des fragments de terres inconnues, nous aurions été enfants des ondes et de l'azur et peut être l’envie de mourir aurait effleuré nos esprits dans l’espoir que notre pélérinage puisse se noyer dans les vagues de l’éternité…

Claude

16.7.06

L'après midi aphone




APRES MIDI APHONE

J’ai passé le pont, celui qui enjambe la petite rivière qui coule au fond de la vallée. J’ai franchi le pont de vieux blocs mal équarris ajustés peut être par l’un de ces Romains venu de ce lointain pays d’oliviers et de douces collines s’arrondissant au soleil
J’ai traversé le pont coupant d’un pas léger l’onde indocile. J’ai commencé ma montée vers l’autre versant de la vallée empruntant ce petit chemin qui serpente le long de la pente et comme d’habitude je me suis allongé sous ce vieux noyer au tronc tourmenté comme la noire conscience d’un mécréant
Je me suis allongé sur un tapis de cette herbe fraîche qui sait croître dans les endroits ombreux alors que le reste de la prairie se parsème de larges langues blondes de tiges éreintées de soleil
Je me suis étendu et j’ai fermé les yeux pour mieux l’entendre venir
Et j’ai perçu son approche légère à peine effleurant la touffe d’herbe sèche pour commencer sa descente vers moi, sous mes paupières fermées, j’ai senti toute la légèreté d’un corps souple et flexible venant prendre place doucement à mes côtés
Son souffle a rafraîchi ma poitrine, à peine perceptible mais lourd des promesses des moments à venir
A l’oreille, elle a murmuré les mots qui font du bien, ces mots de feu que savent se dire les amoureux au creux de leurs oreilles mais aussi des dits de magie blanche incantatoires et, obsédants, j’ai senti le désir se saisir de mon sexe et l’éveiller en ondes puissantes et renouvelées
Elle a écarté les pans de ma chemise et sa main s’est lentement promenée, plus bas, encore plus bas jusqu’à mon ventre durci et frémissant sous la caresse insistante de doigts habiles et attentifs
J’ai gardé les yeux fermés et mon visage a pu ressentir la douce chaleur des rayons de soleil tamisée par les branches du noyer complice
Mon sexe dressé s’est offert, colonne de chair dressée face au ciel flamboyant de l’été, dressé vers le ciel comme une offrande ou prière, dressé comme une étrave pour fendre les mers.
Plus bas, j’ai entendu la rivière insidieusement frôler les pierres jetées entre ses rives pour inlassablemeent en arracher une parcelle et les rendre ainsi à sa merci et, petit à petit, les mélanger à son onde capricieuse
Autour de mon sexe, j’ai ressenti la morsure des préalables et c’est comme si je plongeai tout entier dans un monde inconnu qui s’ouvre à l’exploration ou comme si je disparaissais dans ces brumes qui s’enroulent autour des forêts habitées de l’esprit des temps anciens
Et c’est soudain comme si en longues décharges venues du plus profond de moi, comme un cataclysme, comme un ouragan, ma semence s’en est venue pour fertiliser en éclaboussures bondissantes
Et je suis tombé dans un précipice sans fond et je n’ai pas voulu étendre les bras pour tenter de me rattraper à ses parois trop lisses
Et j’ai gardé longtemps les yeux fermés, si longtemps que je l’ai entendue reprendre son chemin vers la haut de la vallée et quand enfin j’ai regardé autour, rien de sa présence n’était visible sauf peut être quelques herbes à peine froissées. Et il y avait là, tout en bas de moi, une tache humide luisant doucement au soleil maintenant déclinant
J’ai entendu un bref instant son pas aérien déplacer une minuscule brindille et puis le calme est venu
Un peu étourdi, je me suis redressé et j’ai entrepris de descendre la pente pour refranchir le pont dans l’autre sens. Je me suis retourné mais tout n’était plus que silence et les branches du noyer parfaitement immobiles
De l’autre coté du pont, je me suis retrouvé chez moi, en route pour rejoindre les miens, ceux des fonds du vallon laissant là mon amante d’un jour tendre d’été revenir à ses lointaines crêtes bleutées
Ah, oui, au fait ! Je ne vous dirai pas le nom de mon amoureuse, il vous suffira de savoir qu’elle est l’une des filles innombrables du vent, du grand et majestueux vent géniteur de ces enivrantes et fugaces créatures qui hantent les champs et les lascives pentes des collines de mon pays

Claude

14.7.06

Paris parti

Paris, rien de tel que de n’y être pas pour vouloir y revenir. On est jamais content de ce que l’on a, chacun sait ça !
Paris, je l’ai imaginé comme une photo de Doisneau. C’est un Paris qui n’existe pratiquement plus sauf dans ces clichés en noir et blanc où il a su saisir son âme au travers de son objectif
Il m’est arrivé de souvent arpenter ces improbables lieux qu’on trouvait dans le treizième derrière la grande bibliothèque, des lieux que la « civilisation » rattrape avec ses nouvelles constructions au style néo-pompeux à base de glace et de plastique
J’y vais parfois pour retrouver encore, avant qu’il ne soit trop tard, ces quelques
arpents où pousse l’herbe folle et la fleur sauvage et où rode encore l’esprit d’un Paris qui est presque déjà parti.
Pour ceux qui voudraient s'immerger en musique dans ce Paris que je tente d'imaginer ici je recommande l'écoute de Jacques Higelin et de "l'accordéon désaccordé"






PARIS PARTI…

J’aime ce Paris
A la Doisneau
Plein de pigeons
A la con
Et de moineaux
Rigolos
D’enfants hilares
De macs flambards

Des messieurs ronds
Portant
Chapeaux melon
Et des breloques
Brinquebalant
En pendeloque
S’en vont marchant
Tout droit en rêvant

Le long de palissades
Et près des balustrades
Des corbillards
Tout habillés de noir
Attendent obligeamment
Leurs clients












J’aime ce Paris
A la Doisneau
Celui des bars
Bavards
Et leurs comptoirs
Plein d’histoires
Et de cocigrues
Joliment incongrues

J’aime ce Paris
Qui pleure ou qui rit
Plein de Bastille
Et de jolies filles
Qui vont aux champs
En chantant
Et en riant
En empruntant
La rue Aristide Bruant
Ou l’avenue de l’artiste brillant
Pour se mettre au vert
Par la rue du Chemin Vert

J’aime ce Paris
A la Doisneau
Les trottoirs pleins
De gigolos
De badauds
De trottins
Qui sortent à la lumière
Tranquille
Et gracile
Des petits matins
Où je tiens
Dans ma main
Ce Paris
A la Doisneau
Qui s’en est parti
Avec ses pigeons
A la con
Et ses moineaux
Si rigolos
A vau l’eau
Lentement
Et pour longtemps

Claude

11.7.06

Les pantalons garance


C’est en regardant récemment « Les enfants du paradis » et l’histoire de Garance, son héroïne que cette anecdote m’est revenue en mémoire.
C’est l’un de mes grands pères qui m’en a parlé, pour me faire plaisir et après l’une de mes questions car il n’aimait pas évoquer cette période de sa vie.
Je lui avais demandé ce qu’étaient les pantalons garance.
Il m’avait expliqué que ça venait de ce rouge éclatant dont étaient teints les pantalons des jeunes gens qui partirent en guerre en fin d’été 14 et qui, à cause de cette couleur, constituèrent des cibles idéales pour les fusils de l’adversaire de l’époque
Et bien peu de ces gosses de 20 ans vêtus de pantalons couleurs garance revinrent au pays pour y retrouver leur Garance
Et ce n’est que bien plus tard que j’ai fini par comprendre le ton de colère avec lequel mon grand père m’avait parlé de cet épisode bien oublié aujourd’hui. Négligence, incompétence ? Beaucoup de ses amis étaient tombés là-bas dans des champs de l’est du pays et il n’avait jamais pardonné…
Qu'il me soit pardonné à moi de mêler la belle Garance à cette funeste couleur garance de la tenue des soldats





PANTALONS GARANCE



Il partit en pantalons garance
Aux couleurs de sa mie
Qui s'appelait Garance
Et qu’était si jolie
Il partit au soleil de septembre
Quand la lumière est d'ambre
Seul, sur le chemin encaillouté
Dans la chaleur de fin d’été
Et Garance les vit ses pantalons
Ses pantalons couleurs garance
Monter le flanc du vallon
Comme s’il allait à la danse
Celle qui les entraînait
Sous les branches des genets
Qui poussent dans les chemin creux
Où les amoureux s'en vont par deux
Il partit en pantalons garance
Sous les yeux de sa Garance
L’abeille a butiné du genet la fleur
Garance de sa main a essuyé un pleur
Là-bas, déjà si loin
Il a levé la main
Déjà au pays des morts
Mais ils ne le savaient pas encore

Claude

10.7.06

Les voix des maisons



Savez vous que les maisons vivent, les vieilles demeures, j’entends.

Celle où je suis maintenant est ancienne. Du dix sept siècle m’a-t-on dit.

J’ai pensé longtemps qu’elle avait pu être le presbytère de l’endroit car elle est au pied de l’église mais probablement pas. Une seule chose est sûre, elle ne fut jamais une ferme dans ce bourg rural de Bretagne du nord

Ma maison vit disais-je. Elle a son odeur, une odeur que mes narines doivent se rapproprier à chaque fois que j’en refranchis le seuil après en avoir été absent pendant quelque temps comme cela m'arrive encore, une odeur difficile à décrire, celle des bois vieux de charpentes, celle de l’encaustique dont ma grand’mère enduisait les marches de l’escalier de chêne comme certainement sa propre mère l’avait avant elle, des odeurs des jours de fête quand les nourritures doucement mitonnaient dans la cheminée sous les feux de bûches, des odeurs de la vie qui fût avec ses peines et ses joies aussi

Ma vieille maison vit, elle a sa voix, celle qui m’accompagne quand ne veulent plus mourir les longs jour d’été, quand la semi obscurité des jours d’hiver ne veut plus lâcher prise et s’entend à étouffer toutes ces confidences de ceux qui s'y arrêtérent pour un temps plus ou moins long

La maison parle et mélange dans les craquement des bois qui l’habillent les cris de naissance des nouveaux nés, les soupirs voluptueux du moment de leur conception et les râles d’agonie de ceux dont les regards fixèrent en dernier adieu ces murs qui me font face actuellement

La maison parle de ces bruits de l’histoire des hommes et c‘est une étrange symphonie, bonheur, tristesse et désespoir mêlés, tous ces sons qui nous accompagnent sur nos chemins de vie et qui sont la vie même

Ma maison vit, elle vit sa propre vie, elle a son odeur, elle a ses cent mille voix et soudain je mesure la fragilité du temps qui passe et je ressens ma propre fragilité et je sais que bientôt ma propre voix viendra se mêler à ces échanges qui étendent leur marque par delà les siècles et qui trouvent refuge dans les moindres recoins crées par ceux là qui patiemment en érigèrent les formes

Et je sens monter en moi un long frisson fait de résignation et de profonde lassitude dans cette période de l’année où déjà, se mélangeant à la douceur des soirs, se dessine la morsure des frimas à venir et monte du plus profond de moi ce besoin irrépressible de l’aumône d’un autre regard où je voudrais noyer un peu de mes peurs et un peu de ces regrets dont s’enveloppent les jours qui passent et les saisons qui meurent, un autre regard du monde des vivants pour éloigner les voix de celui des morts

Claude


9.7.06

Les grands espaces


LES GRANDS ESPACES

Des espaces
Des grands espaces
Et des montagnes
Et des vallons
Et le vent qui
M’accompagne
Tout du long
De chemins
Sans fin

Des espaces
Des grands espaces
Et un ciel
Qui s’élargit
Pour montrer l’essentiel
D’un aperçu de paradis

Un ciel
Qui m’émerveille
Et qui me rend ivre
De ses couleurs cuivre

Des espaces
Des grands espaces
Et les herbes hautes
Qui sursautent
Et se redressent
Sous la caresse
D’un souffle fécond
Venant de ces horizons
Lointains
Où l’œil devine
Très loin
Comme un trait, une ligne
Comme un appel
Un battement d’aile
Pour survoler ces espaces

Oh ! Ces grands espaces
Loin, si loin !
Vers lesquels toujours
Jusqu’à mon dernier jour
Je tendrai les mains

Claude

7.7.06

Les bâtisseurs de cathédrales (3)

Nous arrivons au terme de cette évocation
La cathédrale est sur le point d'être construite, une nouvelle balise s'éléve peu à peu, faite pour marquer les temps comme les Pyramides le furent aussi, sous d'autres cieux, pour d'autres dieux
Quelles seront les cathédrales des époques à venir, celles qui dorment dans les génes en sommeil des enfants de nos enfants, quelles messages délivront elles et pour quels dieux à honorer?
Questions qui trouveront un jour leur réponse dans des matériaux jaugés à l'aune des nanotechnologies ou d'autres techniques encore à venir
L'homme, cet éternel bâtisseur toujours prêt à répondre à la fascination q
u'il éprouve pour la lumiére et son désir de la maintenir dans ces structures à sa mesure






Jean coeur fidèle s’en est venu de Vendôme
Avec pour compagnon Pietro de Dalmatie
Henri du pays lorrain ou Yves de Brantôme
Ils sont maçons, charpentiers, magiciens de la scie
Artistes du ciseau et dompteur de vertige
Pour élever les murs, les colonnes et leurs voliges

Grâce à leurs doigts habiles, Aaron l’égyptien
Y voisine avec Melchisédech ou le mage chaldéen
Et quand Jean se redresse pour regarder les cieux
Et demander pourquoi maintenant et en ces lieux

Au maître mystérieux qui leur dicte ses plans
Suivant un enseignement venu des anciens temps

Écoute bien, lui dit-il, quand se dira la messe
Dans l’odeur de l’encens et le temps des promesses
Tu sauras qu’il est déjà midi à l’heure du poisson
Et quand le prêtre se lèvera pour faire oraison
Ses bras seront aiguilles de l’horloge zodiacale

Celles qui t’ont indiqué de nous bâtir une cathédrale
Et tu apercevras le cercle des constructions sacrées
Cromlechs, mégalithes et autres pierres levées
Par-dessus des montagnes et sous d’autres horizons
Dans des pays situés au-delà de la mer des Bretons
Tu sauras pourquoi tu es de notre fraternité
Alors et enfin, tu seras un homme aux sens éveillés


Claude

6.7.06

les bâtisseurs des cathédrales (suite)


Ils sont arrivés venant parfois de très loin mes ouvriers, avec cette foi qui soulève les montagnes.Ils sont prêts à entreprendre le chantier, le plus souvent sur des ruines de très anciens temples où on vénérait de très anciens dieux
Voici donc la suite de ma petite histoire, celle des bâtisseurs de cathédrales...




Et ils vinrent tous ensemble,
les maîtres maçons
Les compagnons finis et ouvriers à façon
Qui apportant sa masse, son ciseau, son outil

Tous des plus savants et jusqu’aux apprentis

Les temps étaient venus, suivant la prophétie
Des Olmèques, des Mayas ou des peuples de Syrie

Selon les mots d’Aristote, d’Hermès ou de Thot
Suivant des plans anciens accompagnés de cotes

Ils s’arrêtèrent sur la trace de dieux oubliés

Dans des lieux où ils furent longtemps vénérés

Ils s’arrêtèrent en ces lieux d’un savoir caché
Ils s’arrêtèrent là par devoir et par nécessité


Avec eux ramassés en chemin, les bateleurs
Batteurs d’estrades, astrologues et putains

Tire-laine, truands ou bien marchands de pain

Jongleurs de fortune, marauds et voleurs

Un peuple s’agglomère se déchire ou s’étreint

Dans le tumulte, le brouhaha d’un petit matin
L’air se charge de parfums, d’odeurs de la vie
De musc, de senteurs de la lointaine Arabie

De friture, de repas qui mitonnent.


Un chant s’élève, le marteau s’abat et résonne
Taillant la première pierre du futur bâtiment

Ils sont tous là à son exact emplacement

Ils sont tous là: le carrier, le maçon, le sculpteur
Et avec eux l’évêque, le moine et l’échevin
Gens d’importance portant habit de drap fin

On leur a dit qu'enfin c’était le lieu et l’heure

Et la roche s’élève, se fait ange ou démon

S’anime de feuilles, de friselures, de frissons

Les murs sont leçons d’histoire et aussi orateurs
Le maître verrier savamment mélange ses couleurs

Pour y piéger la lumière qui s’étend et inonde

Les vitraux qui racontent la création du monde

Et le rocher donne naissance à l’alchimiste, à l’initié

Aux rois puissants de Judas ou de chrétienté...



A suivre

5.7.06

Les bâtisseurs de cathédrales

Les cathédrales: Quand on emploie ce vocable, ce sont ces prestigieux vaisseaux de pierre des années 1100 et quelques de notre ère auxquels spontanément nous pensons.

Le phénomène a duré entre un et deux siècles, mystérieusement des équipes se sont constituées pour ériger ces légèretés de pierre, ces dentelles du minéral.

Des équipes se sont constitués, héritières et dépositaires d’un savoir technologique inouï et puis ont disparu.

Les cathédrales gothiques soudain s'étendirent s à l’Europe pour montrer la voie des étoiles et cette voie montrée, leurs bâtisseurs, tache accomplie purent rejoindre l’ombre dont ils ne sont sorti qu’un court instant et que magistralement évoque Fulcanelli dans ses fulgurances ésotériques

Imaginez vous un instant nos vastes parvis d’aujourd’hui à l’époque médiévale, imaginez les sans ces bâtiments prestigieux qui bordent leurs horizons.

Imaginez la foule bruyante et bigarrée habitée d’une foi dans cette époque fût le sommet…

Nous sommes en ces ans de grâce en fragile équilibre entre ce qui fût et ce qui sera.

C’est là que commence mon histoire !!

LES BÂTISSEURS DE CATHÉDRALES

Ce fut aux environs des années onze et cent…
Le bruit se répandit comme onde sur l’étang
Par-dessus les coteaux, en suivant les vallées

Porté par les marchands et montant comme marée
De clocher en maison, de château en bourgade
Dit dans des chansons, clamés dans des ballades
Avec le voyageur sur les chemins de poussière
Avec le troubadour, le baladin, le trouvère
Au fin fond de la plaine, dans le moindre vallon
S’en venant de la Flandre ou du pays wallon

Des collines de Toscane aux plus hautes montagnes
Né en Estrémadure ou bien en rase campagne

Ce fut au début des années onze et cent
De Venise à Paris ou bien de Liège à Gand
Entendu par le tisserand, repris par les conteurs
Pendant la veillée ou pour quelques lecteurs
Inspirant escholiers, clercs et autres Goliards

Les gens de réflexion ou les moines paillards
Pénétrant de cellule en chapitre de monastère
A mâtine dans les alléluias et les Pater noster
Le petit peuple, les grands seigneurs, les évêques
Les marguilliers et autres ramasse-quêtes
Tous surent de Noël à Pâques ou Chandeleur
Qu’enfin était venu le temps des bâtisseurs...

A suivre...

3.7.06

Les petites culottes


C'est juste pour le fun, hein!!
Mais c'est vrai que c'était bien sympa ces bouts de tissu qu'on voyait flotter gaiment au vent mais de toutes les manières avec cette foutue mode des strings, pfffft!!
Qu'est ce qui reste maintenant à sécher hein?

Mais avec un titre comme ça, c'est sûr, je fais exploser l'audimat...


PARIS DESSOUS

Paris qui sort
De son sommeil
Qui, encore
à moitié dort
Et qui se met en éveil
Paris des portes
Qui nous emportent
Vers Bercy
Le Bois joli
Ou Bicêtre
Et qui à ses fenêtres
Exhibe certaines
Des ses merveilles
Pour notre réveil
Des dessous de reines
Des petites culottes
Qui doucement
Flottent
Au vent innocent
Des petites culottes
De coton blanc
Des bleues ou des noires
A nous faire voir
La vie en or
Et en Technicolor
Les culottes
Des petits matins
Parisiens
Et qui flottent
En joyeux
Petits drapeaux
Des milliers
De tendres appeaux
Joliment familiers

Mais tout ça,
C’est du passé
Tout ça est dépassé
Maintenant, voilà
Tous ces dessous
Se sont dissous
Dans les marécages mous
De nos vies à cent sous
Et les fenêtres se sont privées
A leurs carrées
De tous leurs atours
Ces invites à l’amour
La culotte
Rigolote
Est devenue revêche
Et sèche
Dans de grands instruments
Tout blancs
Nous privant injustement
De ce spectacle
Au goûts de miracle
Entrevu
Dans ces bouts de tissus
Où s’accrochaient nos regards
Au hasard
De la rue

Claude
Paris 20004

Ombres légères

      J'ai récemment évoqué ici deux silhouettes féminines qui ont, plus ou moins brièvement, croisé ma vie à divers ...